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19 octobre 2017 4 19 /10 /octobre /2017 19:37
la mystification des écoles  japonaises d'arts martiaux
 
La vérité est en marche et  rien ne l'arrêtera
        E. Zola
 
 
Depuis quelques années, des recherches historiques sérieuses ont permis de s'assurer de faits sur l'histoire des arts martiaux. A la fois en Orient (principalement la Chine des Ming et le Japon d'Edo/Meiji) et en Occident ( la Grèce, la Rome antique et l'Europe de la renaissance).
 
Toutefois ces apports majeurs ne connaissent pas la diffusion dans le public qu'ils sont en droit de connaître.
 
Deux raisons à cela :
 
- Le public des arts martiaux n'est pas spontanément tourné vers la recherche universitaire (sauf le Judo, de part ces origines mais il a, je crois, perdu une grande partie de cet atout). Il y a donc peu de relais de connaissance qui peuvent essaimer et donner aux arts martiaux une vision fondée sur des faits.
 
- La plupart des personnes en position d'autorité refuse de clarifier les points litigieux.
 
Vous en doutez ?
 
Demandez une définition du Karaté à un membre de l'administration de la FFKDA ou à un quelconque pratiquant de haut niveau. (la vidéo où F. Didier répond à R. Itier est à cet égard significative). Il y a avait une vidéo qui tournait sur le net avec des définitions du Karaté données par les cadres de la FFKDA (pour un anniversaire, me semble-t-il), le manque de connaissance/recul étant patent. Pour des passionnés pratiquants (avec des subventions publiques tellement la discipline est importante....), cela fait un peu bizarre. Étrangement, je ne trouve plus cette vidéo. (si une âme charitable la retrouve ...)
 
La meilleure réponse que vous aurez sera, peu ou prou  : "une discipline de combat pied/poing originaire d'Okinawa".
 
"C'est un peu court jeune homme". Ce type de définition pose plus de problème qu'il n'en résout.
 
  • - Comment des style importés purement de Chine (comme le Uechi ryu) peuvent-ils être considéré comme "équivalent" à un style plus indigène (comme le Shorin ryu) ? Quel est le point commun TECHNIQUE qui établit la filiation ?  
  • - Si le point commun est purement géographique, est ce à dire que si la boxe thaïlandaise ou la boxe française sont enseignées par des Okinawaiens, elles doivent être considéré comme des styles de karaté ?
  • - Pourquoi, toujours techniquement,  le Karaté est-il du Karaté et pas de la boxe française (au hasard) ?
  • - A partir de quel moment, pourra-t-on considérer qu'un style de karaté développé en dehors d'Okinawa (au hasard le shotokan) n'est plus du Karaté ? (50 ans hors d'Okinawa ? 60 ans ? 1 siècle ?  )
  •  
Ces "non-réponses" (le Zéro de la méthode scientifique) à des questions basiques pour quelqu'un dans une vraie démarche scientifique ne font que mettre en exergue la difficulté d'avoir des définitions claires dès que l'on parle des arts martiaux. Ce point se pose de manière cruciale sur les arts martiaux japonais qui n'ont pas, contrairement aux arts martiaux chinois (et cela dès les années 1920- cf le travail de José Carmona de présentation des historiens Chinois), fait une différence claire entre les mythes, les légendes et les faits.
 
Pour être précis, les arts martiaux japonais n'ont pas fait l'objet d'une communication claire pour établir ce qui était de l'ordre de la légende (agréable à écouter et motivante pour le cerveau émotionnelle, l'équivalent de films, séries, livres, etc .....), du mythe (qui structure une communauté.....) et des faits (qui sont les seuls à permettre d'accéder à l'expérience de nos échecs et réussites passées et donc nous permettent de progresser et pas seulement de changer).
 
Dans le cas des arts martiaux japonais (ken jutsu notamment), on est toujours dans le "grand public" avec la théorie d'une différence entre les "arts pratiques de guerre" des bugei ryuha (ecole des disciplines militaires) pré edo ( avant 1600) et les écoles de la paix d'Edo (après 1600) où la discipline n'est plus orientée vers l'aspect pratique de la guerre. C'est de là que viendrait la différence entre le "Bu jutsu" et le "Bu do". Ce fut notamment une thèse présentée par Donn Draeger et reprise par Henry Plée.
 
C'est un discours que l'on entend toujours. Je l'ai entendu, il y a moins d'un an dans une école d'escrime japonaise où le "sensei" rebalançait cela en expliquant bien que lui faisait un art martial orienté sur la "survie" et non un art martial de "paix". (sans rien démontrer, bien sur ..... Uniquement un discours, comme les sophistes ......).
 
Toutefois, ce genre de discours se heurte assez vite à des contradictions. (Dans la démarche scientifique, une contradiction est un indicateur que le paradigme doit être questionné, cf le post sur la méthode scientifique).
 
- Ainsi, ayant pratiqué des disciplines qui se veulent réalistes et scientifiques (notamment le Krav Maga et l'escrime OCCIDENTALE ancienne), il est manifeste que les écoles d'arts martiaux japonaises, notamment d'escrime (toutes, sauf une à ma connaissance ......) n'enseignent PAS des techniques réalistes- aka les plus efficaces possibles. La démonstration est technique et je ne la ferais pas sur ce blog mais vous pouvez trouvez un autre témoignage en ce sens de Tokitsu dans un Dragon Magazine.
 
- Si les écoles d'arts martiaux anciennes du Japon étaient si "réalistes", pourquoi les (rares) rencontres à l'armes blanches entre portugais et japonais se sont elles finis par une défaite écrasante des japonais d'après les archives ( portugaises, il est vrai et nécessitant d'être approfondi pour être vraiment recevable en tant que preuve -cf ci dessous). Mais bizarrement, comme pour la Chine, à chaque fois que l'on veut avoir un exemple historique du fameux discours opposé "Le maitre chinois/japonais a battu un occidental".  Il est impossible de trouver des faits précis. (Date, personne, niveau réel des deux protagonistes). Ceci pour l'histoire mais également dans la période moderne. [Mais en Chine, certains mentors reconnaissent que ce discours n'est pas fondé sur des faits .... c'est là la différence entre la Chine et le Japon en ce qui concerne les arts martiaux.]
 
- Quel est le lien entre un art martial et un art militaire ? L'artiste martial "ultime" doit il être un "tueur" ou un "général" ? Entre ces deux profils, les compétences sont très différentes. Normalement dans une armée, on cherche surtout à avoir un bon encadrement ( une des erreurs récurrentes de l'armée allemande du dernier siècle, si, si !),  la question d'avoir des "tueurs entrainés" est plus que secondaire : La compétence collective prime sur la compétence individuelle. (une exception historique : les Hashashins nizarites avec une tactique très particuliére )
Comment une école d'art militaire (et donc axé sur l'exercice collectif et son encadrement) pouvait être efficace pour accroitre les compétences individuelles ?
 
Avec ces contradictions (il y en a d'autres .....), j'ai eu de plus en plus de mal à m'investir dans les disciplines japonaises. (Pour être clair, je les ai même quitté en tant que self défense, par contre je les trouve toujours intéressantes en tant qu'arts cérémoniels et j'ai même un "crush" particulier pour l'époque d'Edo).
 
Je pense que ce que j'ai connu à échelle individuelle est le reflet de qui se passe à l'échelle collective. Le "grand public" se détourne de la plupart des arts martiaux  car même sans expliciter ces questions de base, il est manifeste qu'il y quelque chose d'incohérent avec ce "récit des arts martiaux" comme équivalent à des arts militaires.
 
Au passage cela vous donne les deux stratégies crédibles pour sortir de cette impasse :
 
- Soit vous explicitez votre positionnement pour bien précisez ce que vous faites (un art martial cérémoniel, qui a des avantages propres)
- Soit vous modifiez les techniques pour tendre vers l'efficacité et dans ce cas, il est inutile d'avoir plus de 1000 styles/écoles (Si l'escrime européenne est unifiée (en gros, ne chipotons pas), c'est qu'il y a une raison technique, les autres méthodes sont moins efficaces. Je n'ai pas dit pas inefficace, j'ai dit MOINS efficace.
 
Et donc nous voila avec des écoles d'arts martiaux japonais qui soi-disant "préparent à la guerre" (d'il y a trois siècles avec lance, arcs, mousquets, etc ..... ) mais dont le principal message est d'être un art libéral. (= qui nous permet de dépasser nos déterminismes innées et acquis et d'agir au plus efficace ET au plus près de ce que nous sommes - Je crois à la théorie de l'Atman pas au Nirvana bouddhiste, vive l'Ego Pur).
 
En effet, il suffit de relire les écrit de J. Kano mais aussi certains auteurs japonais plus anciens (dont Yagyu Munemori, Miyamoto Musashi, etc....) pour comprendre qu'un art martial est un art libéral. Ce qui est visé est au delà de la "pure technique" et visait bien à nous transcender. Musashi le dit explicitement.
Je n'ai pas eu l'impression que l'entrainement militaire visait ce type d'éducation "libérale" mais certains pourront sans doute me démontrer que cet "art" est libéral. (Petit précision, l'art militaire est essentiel, cf. Machiavel et Héraclite, mais pas libéral. C'est sur ce point que Henry Plée a été mystifié ou a mystifié ....)
 
Et donc quel est le lien entre un entrainement militaire "individuel" (même si, en soi, un entrainement militaire individuel est une aberration) et un discipline libérale, l'art martial.   
 
 D'après les anciens experts ,c'était parce qu'au bout d'un "certain temps (merci F. Raynaud), "on" franchissait une étape qui faisait passer de l'un à l'autre (magie de l'Orient ! ). Hum, quand je parlais de sophisme. Par la parole, on cache une incohérence majeure.
 
Dans les faits, l'art militaire est différent d'un art martial. (cf le post sur l'héritage de Shaolin)
 
Le discours visant à présenter les artistes martiaux comme des militaires amateurs ou des miliciens n'est donc pas pertinent. Il peut y avoir un lien (ce fut le cas en Chine) mais il n'est obligatoire. Un artiste martial peut être un milicien/militaire mais un artiste martial, stricto sensu, n'est pas un milicien/militaire.
 
Pourquoi alors les militaires "amateurs" et les miliciens veulent-ils utiliser l'étiquette "art martial". Pourquoi ne pas dire : Je veux entrainer des soldats ou des miliciens ?
 
 
Parce qu'un "art martial" comme art libéral est chargé de valeur positive (et avec raison : Qui peut être contre la liberté et le progrès ?). Certains veulent utiliser cette image pour vendre leur "soupe" (dans un but egotique, pécunier ou pire : politique)
 
Mais un problème se pose  : Comment éviter que certains vendent la même "soupe" ? On utilise l'argument d'autorité  : "je suis un ex commando des force spéciales de la mort" ou le classique "ma technique est meilleure que la tienne mais je ne te la montre pas parce que c'est trop secret". (après plusieurs millénaires, il n'y plus de techniques secrètes dans le combat au contact. Il y a même des livres sur les points vitaux !!!)
 
Mais l'argument d'autorité peut être plus subtil. C'est précisément cette subtilité qui fait l'efficacité de la mystification japonaise. Sur ce plan on peut dire que c'est du grand art.
 
Au lieu de dire simplement, l'art martial japonais est le plus fort. Ce qui aurait amener une grande question : Pourquoi le Japon est il battu militairement dès qu'il sort de son île ? (par les coréens, les russes, les américains - Il n'y a que le train qui ne soit pas passé dessus ... ). [Je sais les mongols ont été battus mais les éléments naturels y ont été pour beaucoup. De plus c'était plus Teutobourg que Bouvines - ]
 
Le discours, donc, a été plus subtil "le VERITABLE art de la guerre japonais TRADITIONNEL est le plus fort, mais il n'est jamais démontré en public. C'est cela le véritable ART MARTIAL."
 
Avec cet argument, il devient difficile de répondre quoi que ce soit. L'ART MARTIAL devient un savoir-faire exclusivement japonais (le reste de la planète est trop bête) et seul des japonais peuvent le transmettre. (Mais ils ne l'utilisent pas quand le Japon mène des guerres à l'extérieur ....mais bien sûr !!!! )
 
La thèse de Karl Friday, dont j'ai déjà parlé, a démoli ce discours avec l'apport de différents universitaires japonais. je vais repréciser cette thèse.
 
Procédons en deux étapes d'abord il n'y a pas un art militaire japonais féodal mais quatre arts apparus successivement dans l'histoire japonaise depuis le VIIème siècle (à peu près).
 
Le premier consistait à enrôler des paysans pour avoir une troupe quantitative et non qualitative ("leur quantité est leur qualité")
Le deuxième consistait en guerrier spécialisé dans le tir à l'arc monté à Cheval
Le troisième était un régiment de piquier avec des archers
le quatrième était le régiment de piquier avec des mousquets
 
A partir de là, il faut savoir de quel art de la guerre on parle ?
 
Le premier ne nécessitait pas d'école.
Pour le deuxième, il y a peu d'artistes martiaux pratiquant l'archerie monté autrement que dans un but culturel ou cérémoniel. (Comment pourrait on adapter cela pour de la self défense ?)
Pour la troisième les écoles d'arts martiaux (bugei ryuha) n'était pas assez nombreuses pour éduquer les soldats (en se basant sur les recherches d'universitaires japonais)
Pour la quatrième, c'est une période très brève suivi après quelques décennies de l'ére d'Edo (la paix). Il n'y a donc pas à ce niveau de savoir millénaire. Un tel travail sur quelques décennies peut tout à fait se comparer avec le travail équivalent en Europe sur un siècle. (2 grandes guerres, quelques guérillas, etc ....)  
 
Donc premier point, de quel art militaire parle-t-on ? Seul le deuxième est individuel, et encore seulement en partie. Tous les autres sont d'abord collectifs.
 
Seul le point trois et quatre sont susceptible d'avoir donner un véritable art militaire codifié.  
 
Et c'est là qu'un deuxième point apparaît : La plupart des écoles d'arts martiaux mettaient l'accent sur l'escrime au sabre (le sabre ou "l’âme du samouraï"). Or le sabre n'est pas une arme de champ de bataille (même pas pour le cavalier archer de la deuxième époque d'après les divers travaux ). C'est une arme de duel ET/OU de self défense. Le Duel et la Self Défense sont très proches même si différentes sur des points essentiels (voir le post dédié).
Là, comme par hasard, il apparaît que les Bugei Ryuha, même les plus anciennes, enseignaient plus des disciplines de self défense à travers cette escrime personnelle, un aspect art libéral transparaissait même (ex : Yagyu Munemori, Musashi - au passage Musashi n'était pas un militaire et voyageait dans le monde civil - comme c'est curieux).
Un art martial n'a donc jamais été crée avec une optique d'application militaire. Il dérive des arts militaires mais son but à toujours été autre. Il est possible de remonter cette optique libéral dès le début des bugei ryuha du japon médiéval. C'est la thèse de Karl Friday et tous les éléments d'information que j'ai récolté, personellement, converge vers cette thèse.
 
Il apparaît donc clairement que l'identification faite entre l'art militaire et l'art martial est fausse.
 
Dès l'origine, l'art martial a été une discipline libérale sans doute à l'origine de self défense mais avec les défauts de son époque (le sabre courbé !!!, des Kimonos !!!!!)
 
Au passage, le traité des cinq roues est un manuel tout à fait cohérent d'escrime  (même vu avec un regard d'escrimeur "occidental"). Ce qui prouve que les principes sont les mêmes en Orient et en Occident. C'est donc un manuel tout à fait valable pour le combat qui peut suivre la "pure" self défense de "réaction à une attaque". Certes Musashi explique qu'il est applicable pour des domaines plus vastes mais qu'il faut beaucoup réfléchir. (Evoluer ? Art libéral ?)  
Le dernier chapitre (le "vide") permettra de démontrer que même dans une telle école d'arts martiaux (le gout du sang apparait effrayant au début de la carrière de Musashi) aboutissait, in fine, à une ouverture sur le monde. Ce fut d'ailleurs le parcours de Musashi qui devient autre chose qu'un guerrier. (Peintre, sculpteur, auteur, ....)
 
Encore une fois c'est une preuve historique qu'une école d'art martial vise autre chose qu'une école militaire (même si la self défense peut établir un pont entre les deux, je milite d'ailleurs pour ce pont, une fois que les différences sont bien identifié entre un artiste martial et un militaire).
 
Ce développement valide le point de vue de Karl Friday (et accessoirement celui de Kano - rappelons que le judo était appelé ju jutsu Kano au début), le BuJutsu et le Budo sont la même chose : l'Art Martial (Apparemment au Japon, ce point n'est même pas en débat tellement cela parait évident)
 
Il peut y avoir des différences de sensibilité (art martial de self défense, art martial sportif, art martial cérémoniel voire l'art martial corrompu :- ( ) mais aucun art dit martial ne peut être confondu avec un art militaire. D'abord par l'aspect individuel prédominant dans un art martial mais également dans l'aspect de développement positif de l'art martial.
 
C'est au passage, pour maintenir "facilement" cette différence qu'une structure portant un Art Martial (par exemple une fédération) doit être :
- Non violente
- Neutre (politiquement, religieusement, philosophiquement, etc ...)
 
Bien après cet échauffement sur les écoles d'arts martiaux japonaises, je m'attaque prochainement à l'Aikido.

Le coin culture  (Si vous allez au Portugal,  vous savez ce qui vous reste à faire)

"In fact there are some records in our national historic archive of more than a dozen encounters of portuguese soldiers and samurais. These encounters are very well described and detailed.
All ended with the same result except one. The samurai was killed in some or wounded ( but killing themselves afterwards in shame) the only register of a killed portuguese soldier was because he had such an amount of sake in his blood that he couldn't stand straigth. The Samurai that killed him was killed in the next day in a sword duel with a portuguese sailor in top condition.
This descriptions are available in "Torre do Tombo" our national archive institution and are available to anyone.
(..)These documents are available in microfilm in the archive, to preserve the actual documents, i know that you can buy copy's of the microfilms and then use your scanner to transfer them to the computer . I've done that a number of ocassions, you need to have a good scanner. The problem his that I take 1 hour to translate the page from the portuguese used in the 16th century to the modern one, not because of the difference in words but the caligraphy , very artistic and well draw words that sometimes make it hard to understand immediatelly.
I do not know if you can buy them from abroad (the microfilms), "

Tiré de feu  "fencing 101. com"

 

 

 

 

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Published by KRAV MAGA et PHILOSOPHIE