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24 novembre 2013 7 24 /11 /novembre /2013 13:47


 [J’ai plusieurs fois eu des remarques sur la longueur de mes posts. Je dois dire que c’est long pour moi aussi ! Toutefois, c’est une nécessité (c'est l'expérience qui parle). Au vu des sujets sensibles que je traite, je suis obligé de bien cadrer mes propos pour éviter des incompréhensions ou un dévoiement de mes propos. Dans ce post par exemple, je traite du combat militaire. Je suis obligé de développer pour éviter qu’un quelconque lecteur puisse penser que je prends parti, en filigrane, pour, par exemple, un pays ou sur un positionnement quelconque vis à vis de l’armée et de ses missions. C’est d'ailleurs la raison pour laquelle je me réfère souvent à des exemples anciens beaucoup plus neutre "politiquement" (moins d’influence du cerveau singe ….) et donc permettant plus facilement un travail du néo cortex]

 

 

 
 
Un militaire qui se repose uniquement sur son expérience professionnelle pour vendre de la self défense à des civils est un ….ignorant ou un escroc.
 
Un krav-mytho qui prétendrait vous former au combat militaire moderne sur la seule base de son entraînement au "krav-raté" vous mettra en danger.
 
Pourquoi ces nuisibles individus peuvent-ils perdurer dans nos sociétés où l'information est, soi disant, reine ?
 
 
Parce qu’il existe une très grande confusion entre la self défense et le combat, notamment le combat militaire.
 
(Même dans la communauté des artistes martiaux : Je pense notamment à tous les pratiquants des disciplines martiales cérémonielles qui n’ayant pas, dans le cadre de leur discipline à faire de recherche sur la réalité contemporaine de la violence se contentent, sans même s’en rendre compte, d’une approche aussi biaisée que celle d’une personne non pratiquante....)
 
La différence entre les deux approches vient du fait que la self défense commence dans la violence de basse intensité pour ensuite, éventuellement, passer dans la violence de forte intensité, alors que le combat (notamment militaire) est, par définition, dès l’origine dans la violence de forte intensité et n’a pas vocation à redevenir une situation de violence de basse intensité (Même s’il peut, dans de rares conditions, commencer en violence de basse intensité).
 
Ainsi supposons que vous soyez un soldat en temps de guerre. Vous voyez quelqu’un à 20 mètres de vous. Si la personne s’approche de vous, vous êtes en droit, après les sommations d’usage d’ouvrir le feu. De même si vous voyez quelqu’un qui porte l’uniforme de l’armée opposée vous êtes également en droit d’ouvrir le feu sans délai… (C’est même recommandé….). J’ai schématisé, comme toujours :  pour éviter les abus et les erreurs, il y a normalement des règles d'engagement que doivent respecter les soldats. Mais vous êtes « normalement » dans un cas où la violence est de forte intensité. Il est très rare que vous ayez à gérer seul un adversaire proche de vous (sauf dans le combat de rue et dans l’investissement d’un bâtiment…un cauchemar d’ailleurs pour les armées de toutes les époques : voir, par exemple, la prise de Carthage par l’armée romaine ou la plus récente bataille de Falloujah).
Vous êtes, normalement, dans des situations où la violence est de forte intensité. Vous n’avez pas à réfléchir pour savoir si vous êtes en situation de combat ou non. De base, vous êtes (et vous restez) dans une situation de combat où il faut « juste » savoir séparer l’ennemi de l’ami (tâche difficile surtout de loin, de nuit et avec des uniformes poussiéreux….) et où vous pouvez utiliser la totalité de votre armement, sans souci de proportionner la « riposte ».
 
Dans la self défense, au contraire, la violence est de basse intensité : Vous ne savez pas à l'avance que vous allez faire face à une attaque : il n’y a pas de déclaration claire dans ce cas (si quelqu’un tient une arme léthale, c’est une déclaration claire…..) et il est, éventuellement, possible de faire renoncer l'autre (Là nous sommes à la frontière avec la protection personnelle) ou que la montée en violence soit limitée. C’est une difficulté supplémentaire : Légalement, aujourd’hui, il ne faut pas être celui qui commence à augmenter l’intensité même si vous subissez une agression.
 
De  plus, vous ne pouvez pas établir, en permanence et dans tous les environnements, un périmètre défensif autour de vous (interdit à tous les êtres humains sous peine de combat) et avoir, également en permanence, une arme dégainée à la main. (Sauf si vous êtes complètement psychopathe …). C'est la raison de l'importance de la main nue dans une discipline de self défense contrairement aux disciplines spécialisées dans le combat....
 
 
Autre point particulier, dans une situation de self défense, l’attaque peut venir de n’importe où. D’où l’importance de travailler (attention, pas seulement de connaître…..) les défenses venant de tous les côtés et à toutes distances car un agresseur peut débouler de votre côté, de votre arrière ou être juste à cote de vous, voire en face (sans doute l’exception dans la self défense ... contrairement au duel ou au match sportif…).
 
Vous voyez que les problèmes techniques ne sont pas les mêmes.
 
-          Dans la self défense, votre adversaire peut venir de n’importe où (de côté, de derrière, en fonçant sur vous) alors que : vous n’avez pas d’arme, votre arme n’est pas prête ou votre arme a été saisie par surprise …..  et sans que vous (ou votre groupe)  soyez « en position ».
-          Dans le combat par contre (et notamment le combat militaire moderne ou dans celui des forces d’intervention de la police) la problématique est, normalement, autre : La direction de la (ou des)  menace(s) est (sont)  clairement identifiée(s) et les armes (les vôtres et celles de votre groupe)  sont prêtes à faire feu, à suriner ou à frapper (pas de délai pour sortir l’arme du holster/fourreau et la protection est assurée sur tous les côtés du périmètre défensif par le groupe).

exercice-conjoint-des-forces-speciales-en-corse-1.jpg

                                                                                                                            Sources : EMA

 

                                                     Ici par exemple, pas besoin de boxe, de bâton ou d'avocat....

                  Ce n'est pas parce que la technique militaire est supérieure, c'est parce que le CONTEXTE est différent.

                   (vous remarquez que chacun des membres du groupe couvre un angle d'attaque potentiel avec un renforcement sur l'angle le plus probable : L'avant ...)

 

 

Vous voyez que les difficultés techniques sont totalement différentes. Nous sommes dans deux mondes qui communiquent (une situation de self défense peut évoluer en combat, une situation de combat peut évoluer en self défense si, par exemple, un adversaire a réussi à s’approcher de vous à votre insu et à neutraliser votre arme) mais où les problématiques et les réponses sont différentes.
 
Au passage vous noterez que le iai jutsu et les techniques de ju jutsu étaient des développements de self défense liés à l’escrime médiévale japonaise. L’escrime (ken jutsu)  n’est pas une self défense puisque vous partez d’une arme dégainée….

Dans cet esprit, le judo et l'aikido m'apparaissent comme des self défense "pures" qui ont oublié la suite (Hojo Jutsu/Do ou Ken Jutsu/Do). Ce qui les disqualifie de la self défense "globale" réelle puisque la réalité n'est pas prise en compte :La clé ou la projection en début de combat est l'exception plutôt que la règle. Il faut que l'attaque soit mauvaise pour que dès le départ ce type de technique passe.

 

Toujours suivant mon analyse, le Karaté et les "Kung fu" m'apparaissent comme des arts de combat mais pas comme des self défense. Oui, je sais, "On" va me dire qu'ils existent des techniques de réaction aux agressions. Mais combien de fois sont elles travaillées pendant une année ? Quelle est le retour terrain qui permet de valider en permanence (voir le post avec Diogène) l'efficacité technique et pédagogique ? (pour un art cérémoniel ou un art historique, je suis d'accord, ce n'est pas un problème....)
 
Vous noterez également, par exemple, qu’un soldat d’Alexandre le Grand, pour le combat militaire avait une compétence pour tenir la sarisse et manœuvrer avec la troupe mais n’avais pas de compétences particulières dans la self défense. Notamment  la capacité à se défendre seul sous tous les angles n’était pas travaillée pour de tels soldats. La phalange macédonienne était d’ailleurs très vulnérable sur les flancs et sur l’arrière car les soldats étaient incapables de mettre en place une défense, individuelle ou par petits groupes, efficace.
 
L’armée romaine avait d’ailleurs une organisation plus souple (manipule) pour pouvoir être plus adaptable. Mais là encore le légionnaire romain apprenait à se battre, en combat rapproché, au bouclier et au « glaive ». Dans un contexte civil (où le soldat n’avait pas plus de droit qu’un autre citoyen romain) ou de pacification, un légionnaire ne se promène pas avec son bouclier………(Surtout quand c’est le moment de dresser le camp et qu’il faut couper du bois ou creuser le fossé…..tous les soirs……)
 
Cette différence entre le combat militaire et la self défense est encore plus accentuée de nos jours où le soldat moderne a un armement à distance suffisamment puissant pour que l’adversaire soit annihilé dès qu’il est détecté. (En général en détectant l’origine d’un tir….). Il n’y a pas de possibilité pour l’autre de s’approcher. Sauf s’il accepte de ne pas prendre en compte, pour lui, la problématique de sortie ultérieure de votre périmètre défensif après son action.
 
C’est ainsi que les juramentados philippins utilisaient les armes blanches dans une action suicidaire pour attaquer des soldats américains (marines) possesseurs d’armes à feu . C’est la raison de l’adoption du cal 45 pour la self défense du soldat, que l’on n'a pas le temps d’entraîner à des réactions de défense (qui doivent normalement partir de la main nue pour reposer sur le plus rapide à utiliser). Le cal 38 n’avait pas assez de puissance d’arrêt pour arrêter net l'assaillant.

Il suffit juste d’avoir le temps de dégainer. ( 10 mètres à peu près, expérimentalement, pour avoir le temps de sortir une arme à feu contre une attaque à l’arme blanche ……).

 

Bien sur, Il n'y a aucune solution miracle. Mais sur quoi préférez vous compter pour réagir à cette agression et limiter les dégâts initiaux pour pouvoir entamer le combat (éventuellement avec votre cal 45 de dotation si vous le pouvez ...) ? Une réaction naturelle, mais améliorée, de vos mains ou de vos pieds pour gagner les quelques secondes nécessaires ou un réflexe artificiel (dégainer, i.e. le "iai colt") qui doit faire l'objet d'un entrainement continu et d'un matériel sans faille. (je pense à l'étui avant même le cal 45 en lui même) ?

 

Je vous rassure : Ce problème fondamental de self défense "pure" avait été vu et le matériel avait été adapté: les "marines" américains avaient une bande de cuir à placer autour du cou pour protéger cette cible "prioritaire" des machettes des juramentados. D'où le surnom de "leatherneck" des "marines". On a "transformé", grâce à un matériel adéquat, une compétence en combat à distance en une compétence de self défense/combat rapproché. C'est encore une preuve que l'une et l'autre sont différentes et ne doivent pas être confondues.  
 

 

La différence est donc claire :
 
Un kravist est formé pour la self défense  (attaque de tous côtés, avec diverses distances de départ de l'attaquant armé d’un éventail d’armes contemporaines) et sa suite, le combat rapproché contemporain avec une intensité variable (civile, policière, militaire) car on ne sait pas à l’avance comment une situation de confrontation peut évoluer.
Ces deux aspects de la self défense sont généralement regroupés sous le terme générique de self défense qui couvre à la fois la self défense en elle-même (= la réaction à l'agression ) et le combat éventuel qu'il est nécessaire de savoir mener si la technique de self défense n’a pas arrêté définitivement l’agression. (Rappelons néanmoins que le Krav Maga n'est pas spécialisé dans le combat contemporain rapproché  contrairement à d'autres disciplines).
 
 
Un militaire, y compris dans les forces spéciales, lui, est principalement formé pour le combat militaire moderne (à distance et avec arme à feu = intensité forte, il n'y a pas d'alternative possible) et très très accessoirement formé (ou préparé) pour la self défense et le combat rapproché contemporain (avec uniquement une intensité forte car il n’y a pas d’utilité, normalement, de le former à la self défense policière ou civile…..).
 


En résumé :

 

Un combattant (moderne ou pas) est spécialisé dans le combat de forte intensité. Actuellement c'est le combat à distance avec une arme à feu qui est quasi exclusivement travaillé. 

Un Kravist, ou une personne travaillant la self défense, doit équilibrer la self défense (=la réaction à une agression) et le combat rapproché car il ne sait pas comment une confrontation commence et comment elle peut, à priori, évoluer.
 
 
 
Une fois que vous faites cette séparation entre les deux approches, Il est facile de ne pas confondre les kravists avec des krav-mythos (ou des militaires qui s’improvisent professeur de self défense).


Le coin culture


Un exemple de discipline de combat rapproché spécialisée(qui évite l'écueil de l'exotisme......)

 

Vous noterez que la technique, à la fin, est faite sur un adversaire qui arrive de face et que pour utiliser le Panache (=combat) tel que démontré précédemment dans la vidéo, il faut savoir se dégager d'un étranglement (=self défense). Ce que la dame fait très bien dans le contexte de deux mains encombrées avec ..... un coup de genou aux parties......pas mieux !

 

 

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Published by KRAV MAGA et PHILOSOPHIE